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21 juillet 2008

RELAXE

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Nous arrivons au Tribunal de Grande Instance. Nous sommes deux fonctionnaires. Nous stationnons le véhicule de service et nous dirigeons vers les collègues que nous devons relever. "Bon, voilà le topo, on est là depuis 09h30 ce matin, on a encore rien fait, le gars n'a pas été présenté et il y a encore six mecs avant à passer. Bonne nuit et bon courage". Il est 22h00 et une longue attente se profile devant nous. Nous prenons place dans une salle sans âme, assis sur de veilles chaises d'écoles à lire des magazines relatant les aventures sexuelles du président de la république. La lumière blafarde et agressive des néons encrés dans le faux plafond fatigué commencent à nous taper sur le système. Après deux heures d'attente et d'intéressantes lectures on nous fait signe que l'on peut accompagner le prévenu dont nous avons la charge en salle pénale n°1. Nous extrayons donc le prévenu de sa geôle avant d'entamer le long couloir parsemé d'innombrables portes battantes menant à la salle n°1. Arrivés à destination il nous faut encore un peu de patience. Nous devons attendre dans un petit local donnant sur la salle d'audience. Ce local est plutôt glauque. Une bande de crasse située à une trentaine de centimètre du sol fait le tour de la pièce comme pour témoigner des appuis répétés des innombrables rangers des impatients s'adossant au murs. Quelques chaises, reliques des années 70, parsèment la pièce à disposition des fonctionnaires. A l'entrée du local sont griffés quelques mots sur le mur : "Pour les téméraires, lire le message situé plus bas à vingt centimètres du mur". Il suffit donc de se pencher en avant pour lire plus bas : "Fais attention, tu vas te faire enculer, je me suis déjà fait avoir". Humour "collègue" exaspéré d'une trop longue attente, dans un local trop exigu. La porte donnant sur le tribunal supporte une affichette sur laquelle est marqué : "comparution immédiate". Une flèche dessinée à la main indique sous ce message un petit mot écrit au stylo bille : "menteur". Une heure d'attente et l'on nous fait signe d'entrer dans le tribunal. Le prévenu prend place et écoute le juge relater l'affaire qui le concerne. A savoir une extorsion d'argent commise avec violence, en réunion et dans l'enceinte d'une gare. Réquisitions du procureur : six mois de prison avec sursis. Ensuite, plaidoirie de l'avocate du prévenu qui s'échine à démonter la procédure en disant entre autres que "comme d'habitude" la police ne s'est pas attachée à tel ou tel détail, que le tapissage effectué afin que la victime reconnaisse ses agresseurs n'a pas été fait dans les règles de l'art puisque seul les mis en causes ont été présentés et non au milieu d'autres personnes tout à fait hors de cause, et bien d'autres choses. Le juge met exergue le fait que 30 euros ont été retrouvés sur chacun des mis en causes, au nombre de trois, au moment de leur fouille au début de leur garde à vue. Cette somme aditionnée correspond à celle extorquée à la victime, soit 80 euros. L'avocate explique alors que la somme de 30 euros peut raisonnablement correspondre à de l'argent de poche vu que son client n'a que dix-huit ans à peine et que ce dernier vit encore chez ses parents. La parole est ensuite donnée au prévenu qui persiste à dire qu'il n'a rien fait et que ce n'est pas lui. D'ailleurs le juge avait déjà lu à haute voix peu avant l'audition du mis en cause qui nie effectivement tout en bloc dans le procès-verbal. Suspension d'audience avant le délibéré. Encore de l'attente dans cette petite pièce morose. Pour tromper l'ennui je m'amuse à lire les graffitis noircissant les murs de la cage d'escalier donnant sur ce local. Certains sont drôles, d'autres cochons voire pervers et d'autres antisémites. L'attente ne fut cette fois pas très longue et à nouveau nous nous retrouvons dans la salle d'audience pour le rendu du jugement. Le prévenu reste debout et nous faisons de même, juste derrière lui. Verdict : relaxe. Pas assez d'éléments démontrant sa culpablité. L'avocate a fait du bon boulot. Relaxe... nous étions mobilisés depuis notre prise de sevice pour cette mission. Nous n'étions pas dehors à assurer la sécurité de tous mais dans l'enceinte d'un TGI à lire des magazines relatant les aventures sexuelles du président et des graffitis stupides griffés sur des murs emplis de crasses. Les collègues de la journée étaient quant à eux présents depuis 09h30 du matin. L'individu est sorti libre du tribunal. Nous avons certes effectué une des nombreuses missions de la police. Oui... c'est vrai. Mais pour effectuer ce genre de mission, parfois il vaut mieux être sourd.

policeline

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